Les locataires du 1040 Ball exigent la fin des conditions de vie « intolérables »
Cafards, souris et harcèlement ne sont que quelques-unes des circonstances qui ont été évoquées par les résidents d’un petit immeuble résidentiel situé dans l’ouest du quartier.
Un petit groupe de résidents de Parc-Extension est descendu dans la rue devant leurs six-plex la fin de semaine dernière pour manifester contre les conditions de vie terribles dans lesquelles ils sont forcés à vivre.
La manifestation a eu lieu au 1040 rue Ball, vers midi samedi dernier. Environ une douzaine de personnes tenant des pancartes et des bannières se sont rassemblées pour exiger des conditions de vie plus sécuritaires et plus salubres.
La manifestation et la conférence de presse étaient organisées par le Comité d’action de Parc-Extension (CAPE), ainsi que par plusieurs résidents de l’immeuble.
« Des locataires et des membres du Comité d’action de Parc-Extension (CAPE) ont tenu une conférence de presse et un rassemblement aujourd’hui devant le 1040 avenue Ball, afin de réclamer une solution immédiate aux problèmes d’insalubrité dans l’immeuble et la fin du harcèlement par le propriétaire », peut-on lire dans un communiqué.
Conditions de vie « intolérables »
Au fil des années, les piètres conditions de vie au 1040 Ball ont été soulevées à nombreuses reprises auprès des organismes et plusieurs plaintes ont été formulées à la Ville de Montréal. Des inspecteurs municipaux ont eux aussi inspecté les lieux plusieurs fois.
« Des locataires dans l’immeuble attendent depuis des années que leurs conditions de logement s’améliorent, et le fait qu’ils et elles soient contraint-e-s de demeurer pendant tout ce temps dans des appartements avec des moisissures, des rongeurs, des coquerelles et des punaises de lit, à cause de la négligence du propriétaire, est une atteinte à leurs droits et à la dignité humaine », a déclaré Rizwan Khan, organisateur communautaire au CAPE.
Les locataires ont témoigné de leurs mauvaises conditions et ont déploré le comportement harcelant du propriétaire. Les manifestants ont exigé que le gouvernement municipal ainsi que les autres candidats municipaux fassent tout ce qu’ils peuvent pour rectifier les conditions dans l’immeuble résidentiel.
Les immigrants particulièrement vulnérables
Les locataires du 1040 Ball ont déclaré que les conditions dans le logement étaient si mauvaises et la situation jugée si intolérable « qu’elle constituait une entrave majeure à leur droit à un logement décent », peut-on lire dans la déclaration.
Le CAPE affirme que la situation est rendue encore pire considérant que de la majorité des résidents sont des immigrants récents, aux statuts migratoires précaires et aux revenus faibles, ce qui leur fait craindre de dénoncer les abus de leurs propriétaires.
« Les propriétaires se permettent d’être négligents parce que leurs locataires craignent de faire valoir leurs droits, à cause d’un statut précaire ou de barrières linguistiques, parmi bien d’autres enjeux », a ajouté Celia Dehouche, organisatrice communautaire au CAPE.
Les organisateurs ont aussi déclaré que beaucoup de résidents qui veulent quitter de telles conditions se retrouvent souvent piégés, car l’augmentation des prix des loyers ainsi que le déplacement des logements abordables les empêchent de trouver un logement convenable à Parc-Extension.
Le propriétaire condamné à payer 12 000 $
Les conditions dans l’immeuble ont été encore plus éclaircies au début du mois d’octobre lorsque le Tribunal administratif du logement (TAL) a ordonné au propriétaire de l’immeuble, Richard Liu, de verser 12 000 $ de dédommagement à Smaro Tzanetoulakos, un locataire de 75 ans.
La locataire a porté la plainte à la Ville de Montréal en 2017, puis encore en 2019, demandant une inspection pour régler une infestation de coquerelles, de punaises de lit et de souris.
Elle a raconté au Devoir que celle-ci l’a obligée à garder ses biens dans des contenants hermétiques et l’a forcé de dormir dans son salon pour éviter la vermine.
Elle croit toujours qu’il s’agit d’une tactique de Liu pour l’inciter à quitter l’appartement qu’elle habite depuis maintenant 15 ans. « Le propriétaire essaie de me faire partir depuis plusieurs années, et je ne pense pas qu’il va s’arrêter maintenant », a déclaré Tzanetoulakos au Devoir.
S’appuyant sur des témoignages et des preuves photographiques, le juge du TAL a ordonné qu’une compensation soit accordée à Tzanetoulakos. Une somme de 3 000 $ a été ordonnée à titre de dommages punitifs pour le harcèlement de la part du propriétaire.
La juge a ajouté que le comportement du propriétaire équivalait à une pression psychologique pour la pousser à partir. Liu a depuis contesté la décision et a déclaré que Tzanetoulakos avait utilisé son âge pour attirer la sympathie et que la dispute initiale était due à une proposition d’augmentation du loyer.
Des demandes à la ville
Avec la montée en flèche des loyers à Parc-Extension et à Montréal en général, les manifestants ont demandé aux responsables municipaux de faire davantage pour résoudre ce problème qui, selon eux, ne fait qu’empirer.
Des organisations comme le CAPE veulent que la ville applique mieux les règles contre les propriétaires qui abusent de leur position et ne prennent pas soin des logements qu’ils louent. « L’accès à un logement décent et abordable, ce n’est pas un luxe, c’est un droit qu’il faut défendre », a ajouté Dehouche.
« Le cas du 1040 Ball met bien en lumière l’importance que des mesures soient adoptées rapidement par la Ville de Montréal afin de protéger les locataires face aux évictions, aux hausses abusives de loyer et au chantage de plusieurs propriétaires, qui menacent d’évincer les locataires si elles et ils réclament des réparations dans leur logement », a indiqué Olivia Dumas, organisatrice communautaire au Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ).